Derrière la vieille garde des Egles, Siffer, Reff, Jacobi et consorts se profile la jeune génération. Ils sont moins nombreux, mais ont autant de talent. Isabelle en est certainement l’élément le plus doué ; après s’être fait remarquer en 2003 avec son album « Morjerot », la jeune institutrice vient de remettre les couverts avec un CD qui a pour titre « Hin un Her ». Voici un album extrêmement soigné sous tous points de vue. Tout d’abord, la voix, la plus belle de la chanson alsacienne, à notre sens ; de plus, Isabelle est de ces artistes qui tiennent à ce que ses textes soient parfaitement audibles et ne se noient pas dans la musique.
Les arrangements musicaux, à la fois modernes et légers, ont donc été réalisés pour permettre de comprendre parfaitement la poésie des textes. Car il s’agit beaucoup de poésie dans « Hin un Her », puisque cet album est consacré à Emma Muller, la poète strasbourgeoise du début du 20eme siècle. Cette femme émancipée était un phénomène dans le paysage alsacien, puisque rares étaient à l’époque les femmes journalistes et écrivains.
Nous voilà transportés cent ans en arrière, à suivre les préoccupations de la bourgeoisie strasbourgeoise (Wo gehn m’r hin, Korrespondenz vom e nasse Summer) ou de l’ouvrière (Strossburjer Midinettle), à partager les joies et peines de la journaliste (Redaktions-Papierkorb, Im Summer) ou encore à observer les choses simples de la vie (Herbscht-Morje, Schwälmel am Dach, Zimmer-Blueme) ; sans oublier la merveilleuse chanson d’amour du canotier (Schifferliedel). Voila un CD (qui s’achête chez Liederbrunne) qui démontre –si besoin était- la grande beauté de la langue alsacienne lorsqu’elle est maniée avec talent